Même si la tendance est à la baisse, la rupture conventionnelle reste toujours très attractive. Côté employeur, elle permet une rupture plus sécurisée du contrat de travail notamment lorsqu’il n’existe pas véritablement un motif valable de licenciement. Côté salarié, elle permet de quitter l’entreprise en bénéficiant d’une indemnité de rupture et d’ouvrir droit à une prise en charge par l’Assurance chômage.
Mais attention à respecter les exigences légales et jurisprudentielles…
Dans quel cas est-il possible de conclure une rupture conventionnelle ?
Fruit d’un accord entre le salarié et l’employeur, la rupture conventionnelle peut être mise en oeuvre à l’initiative de l’une ou l’autre des parties, sous réserve que le salarié soit titulaire d’un contrat à durée indéterminée.
Il est utile de préciser que l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture (Cass. Soc. 23 mai 2013, n°12-13865).
Une rupture conventionnelle peut également être conclue avec un salarié dont le contrat de travail est suspendu (maladie de droit commun, maladie professionnelle, accident du travail, maternité, congé parental d’éducation,…).
Même lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, la rupture conventionnelle reste envisageable.
Enfin, lorsque la rupture conventionnelle est guidée par un motif économique, elle demeure possible à condition que le salarié soit parfaitement informé des droits qui auraient été les siens dans l’hypothèse d’un licenciement économique, de manière à ce que son consentement soit parfaitement éclairé. Dans une telle situation, la rupture conventionnelle ne doit pas non plus s’inscrire dans un plan de réduction des effectifs plus important.
Dans toutes ces situations, les seuls fondements sur lesquels la rupture conventionnelle pourrait être contestée reposent sur un vice du consentement ou un cas de fraude.
Ainsi, des pressions ou menaces exercées par l’une des parties auraient pour conséquence de vicier le consentement de l’autre partie. De même, l’employeur ne peut pas recourir à la rupture conventionnelle dans le but de contourner les règles protectrices applicables aux salariés déclarés inaptes ou qui bénéficient d’une protection au titre de la maternité, par exemple. De tels agissements seraient constitutifs d’un cas de fraude susceptible de conduire à la remise en cause de la validité de la rupture conventionnelle conclue.
En revanche, une rupture conventionnelle individuelle n’est pas envisageable dans les cas suivants : dans le cadre de la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, d’un accord GPEC ou d’un accord collectif portant rupture conventionnelle collective.
Quelles précautions doivent encadrer l’entretien préparatoire ?
Lorsqu’une rupture conventionnelle est envisagée, il appartient à l’employeur d’inviter son salarié à un entretien préparatoire. Il doit en principe informer le salarié de sa possibilité de se faire assister et de la possibilité qu’il a de contacter les services, notamment le service public de l’emploi, qui pourront l’aider à prendre sa décision en pleine connaissance de ses droits.
La cour de cassation a toutefois admis que l’absence d’information d’un salarié sur la possibilité de se faire assister lors de l’entretien au cours duquel les parties au contrat de travail ont convenu de la rupture du contrat n’avait pas affecté la liberté de son consentement (Cass. Soc. 19 nov. 2014, n°13-21207). Cette décion doit malgré tout être prise en compte avec prudence car, dans les circonstances de fait, le salarié était à l’origine de la demande de rupture dans le but de créer son entreprise.
Le salarié peut être assisté :
- Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, qu’il s’agisse d’un salarié titulaire d’un mandat syndical ou d’un salarié membre d’une institution représentative du personnel ou tout autre salarié ;
- Soit, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.
- Si le salarié choisit d’être assisté, il doit en informer l’employeur, lequel peut alors également choisir d’être assisté, ce dont il informera le salarié.
Mais la Cour de Casssation fait preuve de souplesse en ce qui concerne l’assistance, puisqu’elle a eu l’occasion de juger que l’assistance de l’employeur lors de l’entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne peut entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si elle a engendré une contrainte ou une pression pour le salarié qui se présente seul à l’entretien (Cass. soc. 5 juin 2019, n°18-10901).
Lors de l’entretien, employeur et salarié s’accorderont sur les modalités de la rupture et notamment sur le montant de l’indemnité spécifique de rupture et sur la date de fin de contrat.
Le formulaire d’homologation
Une fois que les parties se sont mises d’accord sur les modalités de la rupture du contrat de travail, elles complètent un formulaire CERFA d’homologation, auquel peut éventuellement être adossé une convention de rupture au contenu plus étoffé. Il est établi en trois exemplaires, datés et signés. Deux exemplaires sont désormais suffisants si la demande d’homologation de la rupture conventionnelle passe par le service de télé-déclaration.
L’absence d’apposition de la date sur le formulaire ne permet pas de déterminer le point de départ du délai de rétractation et conduit à la nullité de la convention (Cass. Soc. 27 mars 2019, n°17-23586). La nulllité sera également encourue si la convention n’est pas signée des deux parties (Cass. Soc. 3 juillet 2019, n°17-14232).
Le formulaire doit comporter en outre le montant de l’indemnité spécifique de rupture, la date de fin de contrat et la date à laquelle se termine le délai de rétractation dont dispose chacune des parties. La Haute juridiction considère à ce titre qu’une erreur commise dans la convention de rupture sur la date d’expiration du délai de quinze jours ne peut entraîner la nullité de cette convention que si elle a eu pour effet de vicier le consentement de l’une des parties ou de la priver de la possibilité d’exercer son droit à rétractation (Cass. Soc. 29 janvier 2014, n°12-24539).
L’employeur devra remettre un exemplaire de la convention à son salarié et il devra surtout conserver par devers lui la preuve de cette remise. Il peut être utile de préciser que cette preuve ne peut pas résulter de la seule mention d’un formulaire établi en deux ou trois exemplaires. A défaut de pouvoir prouver la remise d’un exemplaire de la convention au salarié, l’employeur encourt le risque de voir prononcer la nullité de la convention (Cass. Soc. 3 juill. 2019, n°18-14414).
Le délai de rétractation
Une fois le formulaire signé, après un ou plusieurs entretiens préparatoires, chaque partie dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour se rétracter.
Lorsque la rétractation est exercée par voie postale, la date qui fait foi est celle de l’expédition du courrier, peu importe que la date de réception se situe quant à elle au-delà du 15ème jour calendaire (Cass. Soc. 14 fév. 2018, n°17-10035).
L’homologation
Si aucune des parties ne fait usage de son droit de rétractation, il appartient à la partie la plus diligente de faire homologuer la convention de rupture auprès de la DREETS (ex-DIRECCTE).
Il faut veiller au respect du délai de rétractation, car un dépôt prématuré d’une demande d’homologation a pour effet d’entacher de nullité la convention de rupture (Cass. Soc. 6 déc. 2017, n°16-16851).
L’autorité administrative dispose d’un délai de quinze jours ouvrables pour vérifier le respect de la procédure et des droits des parties avant d’approuver la convention.
Précision utile : si la procédure concerne un salarié protégé, la demande d’homologation est remplacée par une demande d’autorisation à formuler auprès de l’Inspecteur du travail.
Vous voilà arrivé au terme de la procédure ! Le contrat de travail du salarié prendra fin au jour fixé par la convention et au plus tôt le lendemain du jour de l’homologation (explicite ou implicite) de la DREETS (ou de l’autorisation donnée par l’inspecteur du travail, s’il s’agit d’un salarié protégé).
Vous avez besoin d’un accompagnement pour mettre en œuvre une procédure de rupture conventionnelle en toute sécurité ou pour vous assister dans le cadre d’un contentieux relatif à une rupture conventionnelle ?
N’hésitez pas à faire appel au Cabinet MAINE LEXI CONSEIL